orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port
orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

e site de Pardies en Igaas, sur le territoire de la commune de Peyrehorade, nous a livré des éléments de réflexion sur une très longue période qui s’étend pratiquement du Premier au XVIIIe siècle. Il s’agit de l’un des plus anciens sites antiques reconnus du Pays d’Orthe. Puis, une tradition chrétienne va s’établir dans la villa antique et la paroisse Saint Martin d’Igaas trouvera là les prémices de son rayonnement. Très modestement, le site s’inscrit dans la tradition des voies jacobites du Moyen-Âge par quelques vestiges exhumés lors de la fouille archéologique, sous la direction de Richard Bavoillot-Laussade, programmée entre 1978 et 1984.

 

orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

Cette carte de la fin du XIXe siècle nous montre les Gaves Réunis non encore canalisés et qui prennent leurs aises dans un large lit, favorisant la présence d'îles et de gués faciles accesibles aux pèlerins, entre Pardies et Arthous.


Ce n’est pas sur un lieu attesté de pèlerinage même si on peut partiellement s’autoriser cette hypothèse car un passage à gué dans les Gaves était parfois possible au sud du site, en direction de l’abbaye d’Arthous. Le monastère de Pardies dépendait en effet de l’abbaye d’Arthous depuis le XIIIe siècle. En 1072, le vicomte Loup Garcie 1er offrit la nouvelle église aux moines de Sorde et de Corheta, afin qu’ils rétablissent, de concert, un couvent à Pardies.

Puis, un chapitre de moines séculiers fut établi au XIIIe siècle, qui survécut jusqu’à l’aube du XVIIe siècle.

orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

Ce monastère a très vraisemblablement dû servir d’étape sur le chemin de Compostelle, que ce soit à l’aller aussi bien qu’au retour.

Mais on le rattache au pèlerinage surtout car il a servi de sépulture à de nombreux pèlerins.
Peut-on dire que le site de Pardies est sur une voie “secondaire” de cette voie “parisienne” ?

Rien ne l’indique a priori. Notre propos se limitera donc à la découverte de monnaies et de coquilles dans l’aire du cimetière médiéval.

Nous sommes donc  en présence d’une relation directe avec des inhumations de personnages décédés en cours de pèlerinage ou revenus de Compostelle et enterrés dans leur paroisse d’origine : Pardies. Il faut garder cependant présent à l’esprit que Pardies fut en soi un lieu de pèlerinage, réputé pour ses bienfaits thaumaturges, notamment, des guérisons de maladies de peau qui y furent longtemps attachés.


La Voie Jacobite Parisienne

C’est dans cette région que la grande voie antique Nord-Sud “Ab Asturica ad Burdigalam” parvient, depuis Dax, au confluent des deux Gaves. Elle sera plus tard aussi la voie “officielle” dite “parisienne” ou “voie de Tours” du pèlerinage jacobite. Mais, sur le chemin de Saint Jacques, les cheminements sont multiples et il faut considérer le pays d’Orthe traversé longitudinalement entre l’Adour et sa limite orientale, vers Cauneille et Labatut. La voie la mieux identifiée l’est grâce au témoignage d’Aimery Picaud au XIIe siècle, qui mentionne son trajet par Sordes, lui donnant ainsi un caractère officiel qui ne se dément pas. Mais là n’est pas notre propos. La relation entre le site de Pardies et le pèlerinage de Compostelle tient essentiellement à des objets spécifiques : cinq coquilles percées et deux monnaies des XIe et XIIe siècles.

orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

Les Monnaies Médiévales et leur origine Géographique

Les monnaies médiévales trouvées à Pardies, soit en place, soit hors contexte, nous donnent des précisions sur l’état des relations commerciales entre le pays d’Orthe et les territoires environnants ou plus lointains. On estime que 60% des échanges se font  sur notre territoire national actuel, dont la majorité peut être considérée comme un commerce de proximité ( Aquitaine et Béarn ). Les 40% restant sont le fait d’échanges essentiellement avec la péninsule ibérique, mais à 90% avec le Portugal, ce qui nous incline à penser que les échanges commerciaux rencontrent nécessairement le chemin de Saint Jacques de Compostelle.
Le nombre élevé de monnaies des XIVe et XVe siècles signifie-t’il une progression notable des échanges ou cet effet n’est-il pas accentué par la meilleure conservation des métaux? Il y a certainement une part de vérité dans les deux hypothèses, mais nous ne pouvons pas les quantifier avec certitude.


orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

Un autre phénomène vient perturber cette première analyse. Le premier avril 1392, lors du traité passé entre Jean d’Orthe et Mathias, vicomte de Béarn, nous relevons la présence d’Abrahe Miras, “jude d’Ascq et de Petreforente, argentaire deu senhor bescomte”. Nous avons donc là une indication avérée de la présence “juive” d’origine portugaise. Cette communauté apporte un nouveau souffle au commerce local, et aussi, une nouvelle monnaie. Nous sommes tout à coup bien loin du pèlerinage de Compostelle.
Ce que nous verrons plus loin laisse à penser que les échanges monétaires des XIVe et XVe siècles ne sont pas forcément liés au pèlerinage de Compostelle. Aucune des monnaies de cette période n’a pu être mise en relation avec certitude avec un épisode du pèlerinage ( nous ne trouvons pas simultanément de coquille jacquaire pour renforcer la thèse ).

orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port
orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

En effet, les deux tombes de pèlerins identifiées comme telles, contenaient des monnaies des XIe et XIIe siècles. Or, même s’il est fréquent que les monnaies déposées dans les tombes soient antérieures à la date d’inhumation, il est difficile d’imaginer qu’elles aient plusieurs siècles de différence avec la date de l’inhumation. Le tableau ci-dessous est seulement un bon indicateur de l’aire des échanges commerciaux et culturels de l’époque médiévale entre le pays d’Orthe et les pays avoisinants.

 

 

À partir du XVIe siècle, on ne retrouve pas la même répartition. Nous avons alors des monnaies françaises et béarnaises en quasi totalité. L'origine "France" va se faire plus insistante aux XVIIe et XVIIIe siècles.

 


orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

Les Coquilles Jacquaires

Cinq coquilles de tradition jacquaire ont été retrouvées, plus ou moins bien conservées, sur le site de Pardies, dont deux dans des sépultures.
L’une d’elle est décrite ainsi dans le rapport de fouilles : “Le défunt portait sur l’épaule gauche, une très belle coquille de pecten munie de trois perforations. La sépulture, en pleine terre avec loge céphaloïdale ( maçonnerie épousant la forme de la tête ) avait été implanté le long du mur gouttereau Nord de l’église romane. Il s’agissait d’un individu de sexe indéterminé et d’âge mûr. Mais cette inhumation est datée par une monnaie trouvée dans la bouche. Il s’agit d’un denier centulle du Xie ou XIIe siècle.
La seconde coquille est issue de la tombe d’un individu âgé. Cette tombe est placée le long d’une fondation de mur antique enfouie à l’intérieur de l’église, la tête près d’un massif maçonné antique, lui aussi enfoui. Elle fournit une valve creuse de pecten, munie de trois perforations. Cette coquille de pèlerin “Jacquet” était placée sur l’épaule gauche du défunt : une monnaie du XIe ou XIIe siècle fut recueillie sous le crâne.

Un troisième coquille a été trouvée très brisée mais sans connexion avec une sépulture en place, dans le remblai d’une tombe du XIVe siècle qui avait bouleversé un étage antérieur d’inhumations.

 

La Tête de Saint Jacques

orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port

 

Tout au long du XIXe siècle, l’église et le cimetière de Pardies, après leur désaffection, servent de carrière pour s’approvisionner en pierres. C’est de cette manière que beaucoup de vestiges se retrouveront en réemploi lors de travaux dans les maisons de Peyrehorade.


Et c’est comme cela aussi qu’est retrouvée une “tête de vieillard”, citée dans l’Inventaire du canton de Peyrehorade. Identifiée comme une représentation de Saint Jacques, une deuxième tête dite “tête de femme” est retrouvée dans les mêmes conditions.


Le Saint Jacques, de style roman, datant des XIIe ou XIIIe siècles, elle est taillée dans la pierre coquillée fine d’Igaâs. Elle est certainement due à un artiste local ou du moins, un artiste qui a travaillé localement la pierre qu’il a trouvée sur place. Dans la région, on connaît une autre représentation romane de Saint Jacques, à Dax.

 

La Tradition du Pèlerinage

Jusqu’au XVe siècle, c’est une période de grand engouement pour le pèlerinage de Compostelle ; engouement qui va décliner au XVIe siècle. Cependant, on trouve mention, beaucoup plus tard, du passage de pèlerins au travers de faits divers retracés dans les registres paroissiaux de Peyrehorade. Ainsi :


Le 26 janvier 1700, mourut à l’hopital, un pèlerin étranger dont on ne sait le nom, ni le lieu, lequel fut assailli le 22 par son compagnon dans le bois de Viatton [ce lieu n’a toujours pas été identifié à ce jour ] et ensuite a été transporté dans l’hopital. Les chirurgiens lui trouvèrent le crâne enfoncé d’un coup de bordon [ le bordon ou bourdon est la canne robuste du pèlerin ]”

Le 31 décembre 1717, mort de Nicolas Montenegro, à l’hopital. Pèlerin de Saint Jacques.


En conclusion de ces recherches, au total cinq pèlerins ont été recensés avec certitude sur une période de huit siècles. Ils ont tous eu droit à une sépulture dans un cimetière de la paroisse. Trois d’entre eux sont connus pour avoir été exhumés lors de la fouille archéologique à Pardies. Pour les deux derniers, du premier quart du XVIIIe siècle, c’est la mention de leur décès dans les registres paroissiaux qui nous rapportent leur existence.

 

 

orthe, compostelle, peyrehorade, landes, aquitaine, gave, adour, pèlerinage, ostabat, sorde l’abbaye, ostabat, st jean pied de port