Le Radelage ou Flottage du Bois

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orsque l'on parle du radelage au Pays d'Orthe, on pense immanquablement au Gave d'Oloron. Pourtant cette activité est depuis des temps reculés, pratiquée aussi bien sur le Gave de Pau et l'Adour... que de bien d'autres lieux. Le mot "Radelage" lui-même, n'est qu'une variante issue de "Radel", qui n'est autre que la désignation d'un radeau en langue "du Sud". Le verbe radeler va donner "radeleur" ou "radelier", un conducteur de radeau. Si cette pratique peut être considérée comme l'ancêtre du "Raft" (en anglais, raft signifie radeau…) elle est bien loin d'être une activité de loisir. Il s'agit d'un travail (qui n'est pas sans risques, on s'en doute) consistant à guider les fûts des grands arbres abattus en montagne jusqu'aus chantiers de construction navale qui n'utilise, jusqu'au XIXe siècle que le bois comme matériau de construction des bâteaux.

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Au pays Basque, un train reconstitué de radeaux de bois descend la rivière - Ph. J. P. Zimmer

L'Arsenal de Bayonne

Dès le Moyen-Âge, les chantiers navals de Bayonne jouissent d'une excellente réputation. De 1152 à 1451, les Anglais sont maîtres en Aquitaine et c'est tout naturellement à Bayonne qu'ils font construire nombre de leurs bâteaux.

Les divagations de l'Adour, pendant presque deux siècles et demi, de 1310 à 1578, promènent les chantiers de Capbreton à St Jean de Luz. Jusqu'à ce qu'en 1578, Louis de Foix, ingénieur du roi Henri III, rétablit le "boucal". L'Adour revient à Bayonne et s'y fixe définitivement.

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Jusqu'à ce qu'en 1578, Louis de Foix, ingénieur du roi Henri III, rétablisse le "boucal". L'Adour revient alors à Bayonne et s'y fixe définitivement.

 

(Lire un article complet sur Louis de Foix et les tribulations de l'Adour dans Orthenses n°6 de juillet 2005)

 

Ci-contre, cliché du buste de Louis de Foix (1530-1602) de la chapelle du phare de Cordouan - Cliché Jean Marie Calbet.

 

Colbert et son fils Seignelay, en 1669, organisent la marine de guerre. Ils jettent leur dévolu sur ce port de Bayonne, si proche de l'Espagne. Dans cette seconde moitié du XVIIe siècle, de 1667 à 1700, quatorze vaisseaux sont construits à Bayonne, corvettes et frégates pour l'essentiel.

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Mais c'est tout au long du XVIIIe siècle que la construction bat son plein. Quarant-huit flûtes, corvettes, gabarres, avisos et bricks seront lancés. De plus, les chantiers fournissent Rochefort en pièces et membrures pour des vaisseaux de 34 à 80 canons.

Au début du XIXe siècle, le franchissement de la barre du Boucau pose quelques problèmes. Et Napoléon, losrqu'il séjourne à Bayonne en 1808, donne des instructions très précisse pour remédier à cette difficulté, qui ne fut pas levée…

De 1802 à 1825, l'activité du port connaît un très net ralentissement. Il n'en sort que 19 vaisseaux. Puis, en 1852, l'Arsenal est définitivement condamné. Le chemin de fer est arrivé. La vapeur également.

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Bois et Mâture

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Où trouver le bois nécessaire à la construction des grands vaisseaux? Aux XVIe et XVIIe siècles, on pouvait s'approvisionner dans les pays du Nord. À Partir de la Révolution et sous l'Empire, la guerre avec la Russie nous ferme Riga et la Baltique. Mais du bois, il y en a plus près. La forêt landaise avait jadis fourni les Anglais en planches et bois de construction. Par la suite, ils lui prirent les poteaux de mines. L'Adour, à partir de Tartas et de Dax, charria les pins de nos forêts. Pour les vaisseaux de la Marine Royale, il fallait une autre qualité de bois, à la fois plus souple et plus solide, des hêtres et surtout, des sapins. Or, on ne trouve ces essences qu'en montagne. On commença donc à exploiter le bois de Castet en Ossau et d'Arette en Baretous.

Pour faire flotter ces bois dans le Gave, ce fut tellement difficile que la décision fut prise  de les voiturer, par terre, jusqu'à Oloron. L'opération jugée trop onéreuse, l'entreprise fut abandonnée. Pourtant des ingénieurs, accompagnés de charpentiers de marine avaient bien repéré des forêts qu'ils jugeaient inaccessibles.

 

L'exemple des anciens

Cependant, Colbert poursuivait une politique d'autarcie moins coûteuse. Il avait reçu, en 1665, un rapport qui précisait "autrefois, Monsieur du Lis de Ste Colombe avait fait voiturer 139 mâts de la vallée d'Ossau par les Gaves et l'Adour, jusqu'à Bayonne". En forêt d'Issaux, à 25 km d'Oloron, sont en effet, les plus belle mâtures de sapins. "La forêt d'Issaux contient une superficie de 3500 arpens. L'arpent a 100 perches quarrées et la perche a 22 pieds de roi. Cette superficie étoit couverte de sapins. Ils étoient si épais, si serrés avant qu'il fut question de les exploiter, que l'on y prit il y a environ trente ans, une jeune fille sauvage de 16 à 17 ans. Il y avait sept ou huit ans qu'elle habitait ces bois." (Leroy, in "Mémoire sur les travaux qui ont rapport à l'exploitation de la mâture dans les Pyrénées", 1777)

En réalité, ces forêts étaient connues et déjà exploitées, au moins au siècle précédent, puisque le port d'Athas, en Vallée d'Aspe, sur le Gave du même nom qui sera dit d'Oloron un peu plus en aval, est mentionné comme point de départ de la flottaison, en 1693. Un chemin y avait été ouvert dans la montagne: 3800 toises (soit 7421 m), au-dessus des précipices. Cette voie, dite "Chemin de la Mâture", gravissait un col, à 1000m d'altitude avant de redescendre dans la vallée.

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Un bois de hêtres dans les Pyrénées

 

Du Bois dont on fait les Espars

Lorsqu'au XVIIIe siècle, la Marine eut besoin d'énormes quantités de bois, elle fit entreprendre de lourds travaux qui permirent une meilleure exploitation de la forêt d'Issaux et de la voisine, la forêt du Benou. Elle aménagea en même temps, le port d'Athas. Au Benou, on prit du bois de petite mâture. Des espars surtout, pour les leviers qui servent à soulever les canons. Estaba, à l'extrémité de la Vallée d'Ossau, donna également de la belle mâture. Enfin, une autre forêt était située dans la région de Ste Engrâce et une dernière, dite "au Pact".

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L'intendant d'Étigny veille à l'exploitation rationnelle des forêts d'Issaux et du Benou. Le 15 août 1763, il descendra le Gave d'Oloron avec un convoi de trois radeaux de mâture comptant 23 mâts. Arrivé à Peyrehorade, il écrit au subdélégué de Bayonne de "préparer l'arrivée des radeaux avec quelques solennité."

En 1813, le Conservateur Dralet contate qu'en forêt d'Issaux, il ne reste plus que le sol nu et défriché. Mais en 1875, elle est redevenue une forêt magnifique dans laquelle on exploite "un grand nombre de sapins de 30 à 40 m de hauteur."

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La Forêt d'Issaux "Mature" et de Ste Engrâce, à l'Ouest d'Athas, sur le gave d'Aspe; du Benou à l'Est.

Les Radeaux

Les arbres sélectionnés, la coupe commence. Les bûcherons viennent surtout du Pays Basque. Le chantier ouvre les premirs jours d'avril pour se terminer aux environs du 15 octobre. Le lundi, chacun apporte sa provision de farine de millocq, dit blé de Turquie, pour la semaine. Délayée dans l'eau dela gamelle, c'est la base de la nourriture quotidienne. Le soir, avec des orties blanches et des mauves, ils préparent une soupe chaude.

Les fûts des arbres dépouillés de leurs branches, descendent sur des sentiers dallés, véritables glissières, jusqu'au pied de la montagne. Là, des bœufs attelés par paires, les y attendent pour les mener au port d'Athas, sur le Gave d'Aspe.

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Au pied de la montagne, le village d'Athas

Le bassin a 300 pieds de long (97 m), 100 pieds de large (33 m) et 5 pieds de profondeur (1,60 m). Le remplissage des 9000 pieds cube est assuré par les eaux du moulin à scies qui est tout proche. L'assemblage des radeaux et leur mise à flot se fait dans ce bassin.Un radeau ordinaire cube 600 pieds. Les plus gros atteignent parfois 1000 pieds cube. Ils ne peuvent être lancés qu'à la fonte des neiges. Long de 33 mètres, ce radeau ordinaire a une largeur comprise entre 3,60 m et 4,20 m. Jamais davantage, à cause des tournants, des passages étroits et, surtout, des passelis (pertuis ouverts dans les digues de retenue des eaux conduisant aux moulins) et des nasses. Des radeaux moins importants sont composés de manches de gaffes, de planches de bordages débitées par le moulin à scies. Ceux-là ne flottent qu'aux basses eaux.

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Détail de l'arrimage avec la "Gargouille" des mâts qui constituent le radeau. Ph. J. P. Zimmer

Pour fabriquer un radeau, on choisit les mâts. On pratique à leurs extrémités, des échancrures destinées à recevoir les perches transversales qu'on appelle les "barriers" qui servent à assujettir la tête du radeau. On installe des bordages de 12 à 13 mètres de long; ce sont les "ailes". pour renforcer la solidité du tout, on attache tous les mâts ensemble au moyen d'un cordage dit "la gargouille". Il ne reste plus qu'à placer trois ponts, faits de planches pour faciliter la conduite du radeau. Un à chaque extrémité et un autre en son milieu. Sur ce dernier et sur certains radeaux, une légère cabane servait d'abri pour un homme.

Les rames utilisées par les radeleurs ont 20 pieds de long (6,50 m) et de 10 à 12 cm d'épaisseur. Elles sont en hêtre, parfois en sapin.

 

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