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l est possible de se référer aux routes générales déjà étudiées pour émettre quelques hypothèses de passages de pèlerins en Pays d’Orthe. Nous aurions ainsi trois grands cheminements : à l’est, l’utilisation de la voie antique ; à l’ouest, une variante de la voie littorale et enfin, une voie médiane classique.

Les Routes au Moyen-Âge

Dès le XIIe siècle, Bayonne commence à attirer voyageurs et marchandises. Les pèlerins flamands qui sont très nombreux à St jacques, passent tous par Bordeaux, Bayonne et Pampelune, dont les noms reviennent très fréquemment dans les documents relatifs à ce pèlerinage. Au XVIe siècle, les pèlerins abandonnent la voie Bordeaux-Astorga à Castets, et gagnent la route de la côte par Bayonne et Ondres.

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Des actes anciens attestent qu’à cette époque, la région des Pyrénées occidentales devint la grande voie de passage des pèlerins de St Jacques de Compostelle et fut couverte d’hôpitaux et de commanderies qui jalonnaient les divers itinéraires. Comme dans toute l’Europe occidentale, les anciennes voies romaines restaient les routes principales mais les itinéraires étaient multiples cars les routes étaient dans un état très médiocre et l’insécurité régnait. La multiplication des asiles en fut une conséquence. Pourtant, au XIVe siècle, il faut seulement six jours à un cavalier pour faire le parcours entre Pampelune et Bordeaux en passant par St Jean Pied de Port, Ostabat, Sorde et Dax.

Il faudra cependant attendre le XVIIIe siècle pour voir l’extension d’un réseau de voies de grande communication. Parmi les voies secondaires (hors du Pays d’Orthe, mais cependant voisines ), le Cartulaire de Sorde cite la “Via Sarracina” d’Orthez à Sauveterre et la “Via Salinaria”, d’Orthez à Salies,

entre 1072 et 1105.

 

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Salies de Béarn

 

Dès le XIIe siècle, les chanoines réguliers de St Augustin, les Hospitaliers de Saint Jean et les Prémontrés étendent leurs commanderies ( pour les deux premiers ) et leurs abbayes pour les derniers. Tous ces établissements serviront d’asiles et d’hôpitaux pour les pèlerins de St Jacques.
Il faut rajouter à ces établissements, les abbayes bénédictines existant déjà depuis plusieurs siècle, comme Sorde ou Cagnotte et qui accueillent les pèlerins. Le monastère plus modeste de Pardies, à Igaas, sert aussi pour accueillir les pèlerins.
À l’intérieur du Pays d’Orthe, comme chez les voisins béarnais, un réseau de voies va mailler le territoire du Nord au Sud. Nous sommes surtout concernés par la voie de Tours, mais il n’est pas exclu que la voie de Soulac - qui est une variante de la voie de Tours au  Sud de Bordeaux ) - rejoigne le circuit prémontré par Arthous.

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Les Routes Principales du Pèlerinage

1 - La Via Tolosana, de St Gilles du Gard à Toulouse, Lescar, Oloron, Sainte Christine, le Somport, Jaca et Puente la Reina.

2 - La Via Podensis, de Notre Dame du Puy à Moissac, Eauze, Aire sur l’Adour, Navarrenx, Garris et Ostabat.

3 - La Via Lemivocencis, de Vézelay à Périgueux, La Réole, Mont de Marsan, Saint Sever, Sault de Navailles, Orthez, Sauveterre, Saint Palais, Garris et Ostabat.

4 - Le Grand Chemin de St Jacques, de Saint Martin de Tours à Bordeaux, Belin, Labouheyre, Dax, Sorde, Arthous, Garris, Ostabat. Au sud de Dax, c’est la voie romaine de Bordeaux à
Astorga.

Les trois dernières vont faire un cheminement commun à partir de St Jean le Vieux, St Jean Pied de Port, Roncevaux et Pampelune. Ils rejoignent la première à Puente la Reina.

Enfin, la route de Soulac à Lit, Lesperon, St Vincent de Tyrosse, Ondres, Bayonne, St Jean de Luz, Subernoa et San Adrian, rejoint la route générale à Santo Domingo de la Calzada. Cette voie va peu à peu supplanter les autres à partir du XVe siècle.

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La Traversée des Landes du XIIIe au XVe siècles

La voie limousine par Mont de Marsan, la voie de Tours par Bordeaux et Dax et enfin, la voie littorale qui part de Soulac qui qui sera aussi une vriante de la voie de Tours, délimitent une rude et interminable traversée, celle des landes ponctuée pourtant de havres et de sanctuaires qui soulageaient les misères des marcheurs.

Infestées de loups en toutes saisons…


Si l’on en croit J.P. Trabuc-Cussac dans son “Administration anglaise en Gascogne sous Henri III et Édouard Premier” ( Lib. Droz, 1972 ) :
À l’intérieur du duché d’Aquitaine, les routes n’étaient ni nombreuses, ni récentes, ni bien entretenues. Pour des raisons tenant à l’histoire du duché pendant le Haut Moyen Âge, rien n’avait été fait dans ce domaine depuis plusieurs siècles. Encore, la situation était-elle moins mauvaise dans le nord du pays que dans le sud […] Mais les Landes s’enfonçant comme un coin au centre de la Gascogne, formaient entre le nord et le sud, un obstacle redoutable. Inondées en hiver, brûlantes en été, infestées de loups en toutes saisons, elles mettaient Bayonne, Dax et Saint Sever à plusieurs étapes cruelles de Bordeaux. Trois voies s’offraient  néanmoins à qui souhaitait les traverser […] Rustique et mal entretenu, ce réseau routier n’était praticable que par les piétons et les bêtes de somme. Il ne pouvait être question d’y effectuer sur de longues distances des charrois de marchandises pondéreuses. D’où l’importance des voies navigables.

 

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L’état de semi-désert


En résumé, le duché d’Aquitaine se présente au milieu du XIIIe siècle comme un pays de contrastes. De nombreuses et vastes forêts que l’on commence juste à défricher, occupent des surfaces considérables du pays et rejettent la vie en bordure des fleuves et des rivières qui sont aussi de grands axes de communication […] Le Nord, centré sur Bordeaux, connaît une prospérité économique […] Ces caractères sont moins accentués dans le Sud, centré sur Bayonne, où le vin n’est plus l’élément dominant d’une vie économique orientée aussi vers l’élevage et le commerce maritime. Entre ces deux pôles, le centre du Duché, les Landes à l’état de semi-désert, ne sont qu’un poids mort économique et un obstacle à la circulation.

L’ordre du Vicomte d’Orthe


C’est déjà cette situation qui est décrite par Aimery Picaud un siècle auparavant. On franchit enfin l’Adour à Saint Paul lès Dax, à hauteur du vieux pont où s’élève l’hôpital du Saint Esprit. À partir de Dax, l’épreuve est moins pénible et plus humaine car le peuplement a pris de l’importance ( principalement au XIVe siècle ), même si les défrichements  sont encore très modestes.
L’organisation urbaine en bastides ( Sordes, Hastingues ) ou en ville seigneuriale en forme de rue bastide comme Peyrehorade, s’est même développée à la fin du XIIIe siècle. Et, au Sud de Dax, règne l’ordre du vicomte d’Orthe. Obéissant à la tradition de protection du Moyen-Âge, le vicomte établit des règles avec l’autorité religieuse.

 

La Protection des Seigneurs d'Orthe

En accord avec la législation en vigueur depuis le VIIIe siècle, les seigneurs prirent des mesures de protection en faveur des pèlerins. Arnaud-Raymond (1230-1295), vicomte de 1254 à 1295, est un guerrier. C’est lui qui va former le redoutable corps des arbalétriers d’Orthe. Il rejoindra un temps le camp français et Philippe le Bel le nomme gouverneur de Bayonne. L’époque est troublée et, en 1279, à l’abbaye de Cagnotte, le vicomte donne des garanties aux pèlerins quant à la sécurité de leur traversée du pays d’Orthe.

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Au milieu du XVe siècle, Arnaud-Louis (1435-1470), vicomte à partir de 1451, va connaître les affres de la défaite anglaise et sa forteresse sera démantelée sur ordre du roi de France en 1453. S’ensuit une période d’humiliations et de difficultés où le duc de Gramont, son voisin, profite de la situation pour venir tenir un moment Œyregave. Le roi Louis XI sera reçu à Aspremont en 1462 et 1463. Le 28 septembre 1464, le vicomte Louis va réitérer les mesures prises par son ancêtre deux siècles plus tôt, sous le titre “Privilèges anciens des pellerins jacques”. Ce texte, dont nous présentons la teneur dans le chapitre ci-dessous, est connu par un acte du XVIIIe siècle établi par MM. Pierre et Laurent d’Elizabeau, notaires ordinaires du seigneur d’Orthe. Suivant au mot à mot le vidimus authentique de l’ancien et primitif privilège en latin, constitué de cinq articles, préambule et recommandation dont l’original est aux archives de l’abbaye dudit Caignotte et copie contemporaine à la feuille soixante deux et suivantes du second cartulaire abbatial de cedit couvent. L’essence en langue vulgaire ci-registrée a été ordonnée par le sieur Artamon, secrétaire conseil de Messire Anthoine Daspremont […] pour son procès avec l’évêque Dacs, ce troisième d’apvril, par nous Jean Petrisis, clerc du Trésor des Chartes.


Privilèges anciens des Pèlerins Jacques

À la supplique du révérendissime En Steven de Bonnegarde, abbé du couvent de la Caignotte […] très haut, très noble, puissant et redouté seigneur En Louis Daspremont, comte de Orte […] vidime et confirme solennellement les privilèges et protections établies et accordées aux bons et véritables pellerins pas l’autorité de son ancestre antécesseur En Arnaud de Raimond, de glorieuse mémoire, lan du seigneur MCCLXXIX [1279] ledit privilège étant aboli par ruine et grande vieillesse d’escripture. Faict et passé au même lieu que paravant [sic] au préau de la chapelle abbatiale dudit Caignotte, ce vingt huithiesme de septembre, lan du Seigneur MCCCCLXIV.
Tout et chacun pellerin, étant prince, seigneur, noble, clerc ou populaire, où qu’il se rende et d’où qu’il repasse vers Nosseigneurs Saint Jacques de Finistère, Saint Pierre et Paul de Rome, Saint Michel au péril et vers toutes les autres demeures de saints et saintes véritables où sont vénérés les corps d’iceulx et à la condition qu’il porte les signes de son état de pellerin avec le billet de son voyaige accordé et ordonné par son évêque ou autre prélat de son voysinaige, bénéficie et bénéficiera de la protection entière et majeure du seigneur d’Orte et de ses officiers et sujets.

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Si non que oultre tout et chacun pellerin sans regard pour l’accoustrement de son équipaige est et sera soumis au payement des passagers de rivières aux officiers habituels dudit seigneur d’Orte, étant respecté en ceste circonstance le cotx [prix] particulier accordé de tout temps à ceux de cet état [de pèlerinage] tant aux péages entiers et souverains du seigneur d’Orte que à ceux partagés avec le seigneur Dalbret, aujourd’hui le roi à cause que ce duché est uni à la couronne [une des raisons de la recomposition du texte est bien le changement politique dû à la victoire française : cela est dit, le rois de France est seigneur d’Albret], le couvent de Sordes et les chevaliers de la compaignie de Saint Jean, aujourd’hui le commandeur régisseur du Saint Esprit pour cette province.
De même, tout et chacun pellerin ou assemblée de pellerins formant convoi, monté ou non, avec ou sans charroi, serviteurs ou guides, peut et pourra [ré]clamer l’escorte de gens d’armes pour la sauvegarde des personnes et des biens, étant réservé que la dite requeste et payement dudit service seront faits par les prévost, bayles et viguiers du seigneur d’Orte, à l’exclusion de ceux de tous autres seigneurs inférieurs, vasseaux ou étrangers.
De même, tout et chacun pellerin est et sera justiciable universellement et à l’unisson des voisins
[habitants] de ce pays, tant en matière des haute, basse, moyenne, impaire et directe justices non requises ni touchées et retranchées les choses énoncées premièrement.

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Un Havre de Paix ?

Ce texte important a présidé avec d’autres, à la sécurité des pèlerins durant plusieurs siècles. Durant tout un millénaire, du VIIIe au XVIIIe siècles, des textes ont protégé ainsi les pèlerins dans l’accomplissement de leur voyage. pourtant, ils n’étaient jamais à l’abri d’une agression. C’est également un document essentiel qui donne les limites de la juridiction du vicomte d’Orthe dans la seconde partie du XVe siècle, au moment de l’apogée du pèlerinage vers Compostelle. Son emprise s’étend au-delà des limites de la vicomté mais  s’inscrit dans la partie méridionale de l’évêché de Dax et des deux côtés de l’Adour ( “jusqu’à la lande de Josse” ) et du Bassecq ( “Tercis, Saint Pandelon” ). On peut en conclure que le vicomte d’Orthe est l’homme fort de cette petite région, d’autant que sur la partie béarnaise, les limites se sont toujours chevauchées de Saint Cricq ( et même Sorde ) jusqu’à Bellocq. Le vicomte Louis a par ailleurs épousé Agnette de Béarn, fille de Jean de Béarn qui est le fils naturel de Jean III, comte de Foix et vicomte de Béarn. On constate également que son retour en grâce l’autorise à faire démonstration de son autorité sous les fenêtres du château des Gramont à Bidache. La guerre entre les deux famille ennemies connaît de longues périodes de répit.

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Pierre, le fils et successeur de Louis, n’a que dix ans quand son père décède. C’est Agnette de Béarn qui va assurer la régence jusqu’à sa majorité. En 1509, Pierre épousera donc Quitterie, fille du duc Roger de Gramont contribuant ainsi à faire perdurer cette trêve entre les deux familles. On peut considérer que la fin de la Guerre de Cent Ans a permis d’entrer dans une ère de paix relative, favorable aux échanges et aux voyages, participant ainsi à l’essor du pèlerinage de Compostelle.
Le vicomte d’Orthe contrôle à ce moment-là un vaste territoire de  1200 km2 appuyé à l’Adour sur plus de soixante dix kilomètres, d’une part, au royaume de Navarre , à la terre de Gramont et au Béarn, d’autre part.
Dans l’aire de protection assurée par le vicomte d’Orthe, on distingue trois cheminements distincts. Le premier passe inévitablement par Sorde, puis par Saint Cricq du Gave. Le second hésite entre Sorde par Cauneille et Arthous par Pardies en Igaas. Le troisième, enfin, n’est qu’une variante éventuelle pour les pèlerins désirant se rendre absolument à Pardies, Arthous ou Sorde, tant il est vrai qu’il y a des pèlerinages à l’intérieur du pèlerinage et les reliques conservées localement constituent aussi autant d’attraits pour les fidèles.


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